Les jeunes ne sont pas depolitises

Автор работы: Пользователь скрыл имя, 17 Апреля 2013 в 02:17, статья

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Sociologue au Centre d’études de la vie politique française (CEVIPOF, CNRS-Fondation nationale des sciences politiques), Anne Muxel démontre, dans son nouvel ouvrage L’expérience politique des jeunes*, comment ces derniers entretiennent avec la politique un lien construit entre héritage et expérimentation. Si leur intérêt pour ce domaine est bien réel, la forme de leur engagement, elle, a changé, tout comme le contexte même de l’action politique. Une analyse qui bouscule nombre d’idées reçues.

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LES JEUNES ET LA POLITIQUE : AUTANT MAIS AUTREMENT

Sociologue au Centre d’études de la vie politique française (CEVIPOF, CNRS-Fondation nationale des sciences politiques), Anne Muxel démontre, dans son nouvel ouvrage L’expérience politique des jeunes*, comment ces derniers entretiennent avec la politique un lien construit entre héritage et expérimentation. Si leur intérêt pour ce domaine est bien réel, la forme de leur engagement, elle, a changé, tout comme le contexte même de l’action politique. Une analyse qui bouscule nombre d’idées reçues.

 

Non, les jeunes ne sont pas dépolitisés ! Loin s’en faut. Plus informés, ils sont plus critiques et exigeants que leurs aînés à l’égard des politiques, n’ont pas remise leurs illusions, et leur expérience dans ce domaine se révèle plutôt riche, voire pleine de promesses pour l’avenir. Les sirènes alarmistes qui retentissent dès qu’est abordée la question du rapport des jeunes à la politique peuvent donc se mettre en sourdine. En France, en effet, l’implication de ces derniers dans la vie de la cité et leur participation électorale - ou plutôt sa faiblesse - reviennent régulièrement dans les débats. Elles sont meme au cœur de maints programmes d’action. Ainsi, des conseils municipaux de jeunes ont-ils  été créés afin de faciliter leur apprentissage de la démocratie ou encore la réforme des lycées  réintroduit-elle l’éducation civique. En fait, les jeunes sont, aujourd’hui, à la fois intéressés et désintéressés par la politique… comme bon nombre de citoyens. Et pour comprendre le lien qui les y unit, il faut saisir comment s’effectue le travail de recomposition des normes et valeurs inhérent à nos sociétés complexes, à travers lequel prend forme la socialisation des individus. La jeunesse étant, en outre, confrontée à un double impératif : s’identifier à ses aînés  et innover, c’est via la tension entre héritage et expérimentation que se construit son rapport à la politique. Les jeunes rencontrent la politique dans un contexte assez différent de celui de leurs parents, car le système de repérage, les grands clivages idéologiques, sont désormais en partie brouillés. Ainsi, notamment, les oppositions gauche-droite ou socialisme-libéralisme économique ne sont-elles plus aussi évidentes. De même, la mondialisation modifie la perception de l’utilité de l’action collective dans le cadre purement national. La question sociale - prégnance du chômage et des exclusions oblige - n’a par ailleurs jamais été aussi présente dans la formation des enjeux politiques et partisans. Autant d’évolutions qui ne pouvaient qu’influer sur les comportements électoraux de nos concitoyens. Contrairement aux années 60 et 70, le vote des jeunes - dont seule une minorité se rend aux urnes - ne se démarque guère de celui de leurs aînés. Il n’est plus traversé ni par le désirde changer radicalement la société ni par des visées anticonformistes. S’ils renvoient dos à dos la gaucheet la droite, les jeunes identifient, en revanche, les extrêmes comme étant les seules forces politiques à partir desquelles se structure le débat. En dehors de ces extrêmes, dont il convient certes de se protéger, les partis sont peu différenciés.

Mais même s’ils maintiennent une distance, voire nourrissent une certaine méfiance, envers les hommes et les institutions liés à la politique, les jeunes sont loin d’en déserter la scène. Bien au contraire, leur activisme est réel et ils sont très mobilisés. Ici, ils s’impliquent dans la défense des droits de l’Homme, là, ils prennent la tête de mouvements de revendication lies à l’éducation ou à la formation. Leur mode de participation est plus axé sur des actions ponctuelles et ciblées. Ils sont d’ailleurs plus nombreux aujourd’hui qu’à la fin des années 80, et autant que l’ensemble de la population, à déclarer s’intéresser à la politique.  Ce qui a donc changé, c’est d’abord le contenu de leur engagement, mais aussi le contexte de l’action politique.

 

En résumé, quatre clés permettent de mieux appréhender les contours de l’expérience politique pendant la jeunesse : l’influence toujours dominante mais non dénuée d’ambivalence de la famille - les conditions de la filiation politique ont une incidence directe sur les choix des jeunes comme sur leur stabilité dans le temps ; la dissociation de l’univers de la decision électorale des autres formes d’implication politique des jeunes ; les effets du temps lui-même sur la constitution de l’expérience politique - notamment, le temps met à l’épreuve la durabilité des premiers choix et l’infidélité partisane ou électorale est plutôt la règle ; enfin, la recomposition des attentes politiques des jeunes. Et c’est là que bien des images convenues sont  renversées. Les jeunes ne développent pas un rapport indifférencié à la politique. Les années de jeunesse ne constituent pas un bloc d’expériences unifié et continu. S’ils votent moins que leurs aînés, les jeunes sont pleinement concernés. S’ils peuvent être en retrait du jeu électoral, ils peuvent être aussi des acteurs, au premier rang de la mobilisation collective.


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